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Santé publique France et l’Anses ont publié les résultats de l’étude de grande ampleur PESTIRIV mené en 2021-2022 sur 265 sites répartis sur 6 régions viticoles françaises touchant 1946 adultes et 742 enfants.
L’étude PestiRiv, menée par l’Anses et Santé publique France, vient confirmer l’exposition plus forte des riverains, en particulier des enfants, vivant à proximité des vignes. Cette vaste étude a été menée entre 2021 et 2022, sur 265 sites répartis sur 6 régions viticoles touchant 1946 adultes et 742 enfants dont une partie vivait à moins de 500 mètres de vignes, et l’autre à plus de 1 000 mètres de toute culture.
56 substances ont été recherchées dans les urines et les cheveux des participants (imprégnation biologique) ; les poussières et l’air intérieur des habitations et l’air ambiant en prenant en compte les saisons : période de traitements phytosanitaires vs hors traitement et d’identifier les sources d’exposition : agricole, domestique, alimentaire, etc. Des mesures ont aussi été menées sur des fruits et légumes des jardins de certains foyers en zones viticoles pour estimer l’exposition via l’autoconsommation.
Parmi les 56 substances analysées :
Les résultats démontrent qu’une surimprégnation est observée chez les riverains proches des vignes, avec un écart plus marqué en période de traitement. Selon Santé publique France : « Cette exposition plus importante est due au transfert vers l’environnement des substances appliquées sur les vignes, qui est constaté pour la majorité des substances mesurées : il concerne aussi bien des substances très spécifiques de la vigne (par exemple le folpel ou le métirame) que des substances qui le sont moins (par exemple le glyphosate, le fosétyl-aluminium, la spiroxamine). En effet, les substances peuvent se disperser au-delà des zones traitées par des phénomènes de dérive, sous forme de gouttelettes au moment de l’application des produits, ou de réenvol d’une fraction de produits volatilisée après application. Elle s’accompagne d’une redéposition progressive des produits au sol. »
PestiRiv montre que les quantités de produits utilisés et la proximité des habitations avec les vignes sont les deux principaux facteurs d’exposition. Ce constat confirme la nécessité d’agir sur la source d’émission pour limiter les expositions des personnes vivant le plus près des cultures. Le constat est sans appel : vivre près de vignes, c’est être plus exposé aux pesticides.
« Santé publique France et l’Anses recommandent donc de réduire au strict nécessaire le recours aux produits phytopharmaceutiques. Les pouvoirs publics peuvent notamment s’appuyer sur la stratégie nationale Ecophyto 2030, pour laquelle les deux agences appellent à une mise en oeuvre ambitieuse. »
Urines, cheveux, poussières, air intérieur, air extérieur montrent des niveaux de contamination de 15 à 45 % plus élevés chez les riverains. Ces expositions, fortement liées aux pratiques agricoles, augmentent encore pendant les périodes de traitement (mars à août). Pour les urines, les poussières et l’air ambiant, l’augmentation de l’imprégnation urinaire peut atteindre 60 % et l’augmentation de la contamination des poussières varie selon les substances de quelques pourcents à 700 %.
Santé publique France et l’Anses préconisent d’agir sur la source d’émission, de réduire au strict nécessaire le recours aux pesticides et d’informer les riverains avant l’application des produits. Santé publique France et l’Anses envisagent d’approfondir l’étude par des travaux complémentaires afin de mieux comprendre les liens entre contamination environnementale et imprégnations des personnes, améliorer la connaissance des mécanismes d’exposition et décrire les co-expositions aux pesticides et les cumuls avec d’autres facteurs de risques.
Cette étude souligne de manière claire l’impact de la proximité des cultures viticoles sur l’exposition aux pesticides, en particulier durant les périodes de traitement. Les résultats ne doivent pas faire oublier que les collectivités locales disposent également de leviers d’action concrets pour limiter cette exposition sur leurs territoires.
La publication de PestiRiv intervient quelques mois après le vote de la loi Duplomb, qui autorise de nouveau l’utilisation de pesticides interdits depuis 2018. Ce signal politique brouille la trajectoire que la France s’était donnée pour réduire l’usage des phytosanitaires dans le cadre du plan Ecophyto 2030. La mobilisation citoyenne autour de la loi Duplomb montre une attente croissante pour une alimentation plus saine, plus locale, plus respectueuse de la santé et de l’environnement.
Si l’essentiel de la responsabilité incombe aux pratiques agricoles, les collectivités locales ont un rôle crucial à jouer. Elles peuvent :
Elles peuvent aussi relayer l’information auprès des habitants, encourager la végétalisation adaptée, et peser politiquement pour que les objectifs nationaux de réduction des pesticides ne soient pas affaiblis. La qualité de l’air et de l’alimentation rejoignent ici un même combat : protéger la santé publique, réduire les inégalités environnementales et accompagner la transition vers des pratiques agricoles durables.
L’étude PestiRiv s’est déroulée dans 6 régions viticoles : Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur.
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